Rapport de la Cour des Comptes sur l’adaptation au changement climatique : Synthèse du rapport public annuel de 2024

by in Actualité 8 juillet 2024

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La Cour des Comptes, en consacrant son rapport annuel (725 pages en deux volumes) à l’action publique en faveur de l’adaptation au changement climatique (ACC], montre tout l’intérêt qu’elle porte à cette question considérée comme un enjeu majeur. La publication est accompagnée d’un document de synthèse d’une centaine de pages et d’une synthèse spécifique reprenant l’essentiel des idées développées dans le rapport autour de « la nécessité que l’action publique en faveur de l’ACC soit transparente, cohérente et efficiente ».

Le rapport s’inscrit dans la suite des évaluations et des chiffrages récents concernant les coûts et les investissements nécessaires pour faire face au réchauffement du climat, permettant d’en saisir la dimension financière et ses implications pour les finances publiques. Après une introduction générale et un rappel historique sur la question de l’adaptation et ses spécificités du point de vue de la lutte contre le changement climatique en relation avec la question de l’atténuation, le rapport se développe en trois parties distinctes. La première est consacrée aux questions dites transversales en lien avec l’adaptation : la place et le rôle de la recherche publique, le rôle des institutions financières et bancaires et enfin l’aide au développement. La deuxième concerne le cadre de vie et les infrastructures, avec sept enjeux spécifiques, logement, villes, parc nucléaire et hydro-électrique, réseaux de transport et de distribution d’électricité, réseau ferroviaire, politique immobilière de l’État et ministère des armées. La troisième enfin concerne l’environnement naturel, les personnes et les activités, avec six enjeux : la gestion durable des forêts métropolitaines, la gestion du trait de côté, la prévention des catastrophes naturelles en Outre-mer, la protection de la santé des personnes vulnérables, les cultures céréalières et les stations de montagne. 

Constituant un document relai dans l’attente du troisième plan national d’adaptation au changement climatique, le rapport appelle quelques remarques générales. On peut regretter que la santé ne figure pas parmi les thèmes transversaux, compte tenu de l’ampleur de ses composantes en matière de protection des populations et de qualité de vie. Réduire la santé à la prise en compte des canicules par le système hospitalier semble très insuffisant quelle que soit par ailleurs l’opportunité de mesures ayant pour objectif de sauver des vies et de prévenir des atteintes frappant plus durement les plus vulnérables. En outre, la santé mise en question par le changement climatique est une santé globale affectant l’ensemble des vivants sur Terre, humains et non-humains.  

Une autre faiblesse du rapport concerne la recherche car, en mettant l’accent sur la participation de la France à une recherche de haut niveau au plan international, le rapport semble ignorer les besoins de recherche à travers de multiples disciplines aux échelles régionales et locales, permettant l’appréhension fine des conditions nécessaires à l’adaptation. Il souligne cependant à juste titre le peu de développement de la recherche en sciences humaines et sociales : la pertinence et la réussite des actions entreprise sont directement tributaires d’une prise en compte attentive de la diversité des individus concernés et des conditions locales de leur vulnérabilité.

Concernant les enjeux spécifiques, l’analyse apparaît fragmentée : l’agriculture n’est abordée que via les céréales et la forêt, la santé uniquement par les canicules, la SNCF et les réseaux de transport d’énergie masquent la vulnérabilité des autres modes de transport, la mobilité est absente de l’analyse sur les villes, etc… On peut souligner l’accent mis sur les territoires soumis aux vulnérabilités les plus importantes comme les littoraux et les montagnes. Les éclairages apportés sur les centrales nucléaires et l’armée sont très spécifiques, visant des structures directement dépendantes de l’État. Le chapitre consacré aux territoires d’Outre-mer mériterait de plus amples développements compte tenu de leur vulnérabilité.

De manière générale, les préconisations avancées relèvent d’une logique incrémentale et non transformationnelle, évoquée uniquement dans le chapitre sur la céréaliculture. En mettant l’accent sur certaines analyses précises, le diagnostic est approfondi mais perd l’ancrage systémique pourtant donné comme fil conducteur.

Très critique de l’action de l’État, ce rapport constitue un apport significatif, à travers les conseils développés et les lacunes identifiées, à l’élaboration du PNACC 3, dont le champ devrait être beaucoup plus large. L’ample travail de la cour des comptes inscrit avec force à travers l’analyse développés la question de l’adaptation dans le champ d’action de l’État, tout en trouvant pour une part ses limites dans la fonction même de la cour d’encadrement économique et financier. Il constitue une étape significative vers le document stratégique que devrait constituer le PNACC 3, appréhendant l’ensemble des composantes de l’adaptation dans une approche beaucoup plus compréhensive de l’ensemble de ses aspects, situations et acteurs, publics et privés, et les liens entre eux, dont il fait ressortir la nécessité et l’attente, et dont la récente conjoncture politique a encore reculé la publication.