Réduction de l’espérance de vie due à la pollution de l’air par rapport aux autres facteurs de risque

by in Actualité 1 avril 2020

Objectif & méthodologie

Les études réalisées au cours des dernières décennies ont progressivement mis en valeur l’influence de la pollution de l’air sur le développement de pathologies diverses, notamment respiratoires et cardiovasculaires. Ici, des chercheurs ont voulu déterminer la mortalité attribuable à la pollution atmosphérique, et comparer cette mortalité à celle induite par d’autres facteurs de risques.

Pour cela, les scientifiques ont eu recours au Global Exposure Mortality Model (GEMM), qui permet d’estimer de manière très large la mortalité associée à l’exposition aux PM2,5. Ils ont estimé à l’aide d’un autre modèle l’exposition mondiale aux PM2,5 et à l’ozone, puis ont exploité ces données à l’aide du modèle GEMM. Ils ont ainsi pu déterminer la mortalité mais aussi la perte d’espérance de vie liée à l’exposition à ces polluants atmosphériques.

Résultats

En moyenne, 8,8 millions de décès seraient liés chaque année à la pollution de l’air. La réduction de l’espérance de vie induite par cette pollution s’élèverait quant à elle en moyenne à 2,9 ans. Pour comparaison, selon cette étude la mortalité et la réduction de l’espérance de vie liées à la pollution atmosphérique dépasseraient donc celles liées au tabac. En moyenne, 120 décès sur 100 000 sont liés à la pollution de l’air. Ce chiffre est dépassé en Asie et en Europe, ou respectivement 196 décès sur 100 000 et 133 décès sur 100 000 lui seraient dus.

Dans le cadre de cette étude précise, les chercheurs ont aussi évalué la part prise par les sources naturelles (comme les feux de forêt) et par les sources humaines (comme la consommation d’énergies fossiles) sur l’exposition aux polluants observés et donc la mortalité. La pollution atmosphérique de source naturelle n’étant pas contrôlable, l’idée était d’estimer les bénéfices sanitaires pouvant être attendus de la réduction de la pollution atmosphérique liée aux activités humaines. Les chercheurs ont observé que rien qu’en supprimant les énergies fossiles, l’impact de la pollution atmosphérique sur l’espérance de vie serait en moyenne réduit de 1,1 à 1,7 ans. Ces observations confortent le fait que les énergies fossiles représentent un risque sanitaire majeur, et qu’il est donc urgent de réduire leur utilisation.

Les bénéfices sanitaires espérables de la réduction des sources humaines de pollution varient selon les régions, en fonction de la part prise par ces sources dans la pollution atmosphérique générale. Ainsi, en Asie de l’Est, la perte d’espérance de vie liée à la pollution de l’air chuterait de 3,9 à 0,9 ans en supprimant les sources de pollution humaines. Aux Etats-Unis et en Chine, la réduction de l’espérance de vie pourrait chuter de 85%. En Afrique, en revanche, la réduction de l’espérance de vie ne baisserait « que » de 7 mois, passant de 3,1 ans à 2,4 ans. Par exemple, au Nigeria et en Egypte, seule une réduction de 16 à 17% de la perte d’espérance de vie pourrait être espérée en supprimant les sources de pollution humaine.

Conclusion

Cette étude affirme donc la pollution atmosphérique comme représentant un risque sanitaire majeur. Ses impacts sanitaires, en termes de mortalité et d’espérance de vie, surpasseraient même ceux du tabagisme ou encore de la violence. L’étude vient donc appuyer une nouvelle fois la nécessité de lutter activement contre la pollution de l’air pour limiter ses graves conséquences en termes de santé publique.


Références : Lelieveld J., Pozzer A., Pöschl U. et al., 2020 : Loss of life expectancy from air pollution compared to other risk factors: a worldwide perspective. [En ligne]. Cardiovascular Research, 8 p. Disponible en libre-accès sur : <https://doi.org/10.1093/cvr/cvaa025>